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Des migrants partagent leurs histoires

Le lycée Kerneuzec a reçu le lundi 18 décembre des migrants grâce à l'association Babellium. Ils ont témoigné de leurs parcours. Extraits.
Un échange interculturel au lycée. (Crédit photo : journal X heures)
Le lundi 18 décembre était la journée internationale des migrants. C’est une célébration mondiale visant à sensibiliser aux défis auxquels sont confrontés les migrants. Ce lundi, les élèves de la spécialité géopolitique de Kerneuzec ont assisté à une conférence de l’association Babellium. Cette association créée en 2015 permet aux personnes demandant l’asile de s’intégrer en communiquant à travers des activités. Les professeurs du lycée ont pour projet d’enseigner aux élèves le parcours de personnes contraintes de quitter leur terre natale. Trois intervenants de pays différents sont venus pour retracer les étapes de leurs vie. En se remémorant leurs parcours migratoires, ces intervenants, une femme et deux hommes nous offrent un regard poignant sur l’histoire des migrants.
" La France, un paradis " Le premier à se présenter est Mamadou Diallo, un homme originaire de Guinée-Conakri, un pays d'Afrique de l'ouest dont la langue officielle est le français. Quand il a dû choisir un pays pour se réfugier, il s'est tourné vers la France. Ayant colonisé son pays, aujourd’hui la France lutte pour les problèmes politiques de son pays. Le président de Guinée décide de faire un troisième mandat (interdit dans le pays) mais il a pris le pouvoir illégalement et de force. Il utilise l’armée pour faire cesser les manifestations. Le 14 octobre 2019, lors d’une manifestation dans sa ville, Mamadou est arrêté et envoyé en prison où il se fera casser le bras et une dent, jusqu'à la torture pour qu’il dénonce les membres de son parti politique UFDG (Union des forces démocratiques de Guinée). Encore aujourd’hui aucun changement politique n’a été effectué.
Après cette tragédie en octobre, il est contraint de s'enfuir. Il s'échappe de prison de manière clandestine, même si sa vie en dépend. Il rejoint le port, où il travaille sur des bateaux internationaux. Il prend alors un bateau jusqu’au Sénégal où il rencontre des Espagnols qui le conduisent jusqu’au Maroc. Il essaie de prendre un autre bateau mais perd son argent et ses affaires. Coincé au Maroc, il décide de prendre un avion pour la France. Une fois arrivé, il fait une escale à Paris puis vient en Bretagne où il séjourne à Bannalec puis à Moëlan, où il fait du bénévolat. Aujourd’hui Mamadou n’a aucun papier ni même de titre de séjour.
" Une vie n'a pas de prix " C’est au tour de Joanna de prendre la parole. Elle est arrivée en France avec sa famille incomplète, il y a maintenant quatre ans. Elle a dû laisser ses deux aînées sur sa terre natale. Venue d’Angola elle explique que son mari était conducteur pour un homme politique dans son pays d’origine. Malheureusement son mari a causé un accident. Néanmoins, cet événement n'est pas anodin puisqu'il a été pris au piège par des individus armés qui ont abattu l'homme politique. La famille du politicien, souhaitant lui rendre hommage, et certaine que l'auteur du meurtre est le mari de Joanna, ils ont pris la décision de se venger eux-mêmes.
Un soir, son mari étant sorti de prison et réfugié chez une amie, des hommes armés ont violemment menacé, frappé Joanna et ses enfants afin qu'elle dévoile où se trouvait son mari mais Joanna nie. C'est avec la voix remplie de larmes qu'elle nous raconte que les malfaisants sont allés jusqu'à enfermer sa fille de quatre ans dans un congélateur. Joanna ignorait qu'elle était surveillée en permanence, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Son mari et elle ont décidé de prendre des visas pour l'Espagne puis pris un bus pour rejoindre la France. Aujourd’hui elle a refondé sa famille avec de nouveaux enfants et rêve d’une seule chose, repartir dans son pays natal. Elle et son époux sont toujours recherchés aujourd'hui.
" Un amour interdit " Le dernier témoin est Mahdi Moghaddam arrivé en France il y a quatre ans. Il est originaire de Mashad, une ville très religieuse en Iran. Il nous explique avoir été contraint de quitter son pays car il est tombé amoureux d’une femme déjà mariée avec un gardien de la révolution (plus grand groupe d'influence économique en Iran). Il entreprend donc un long voyage en direction de la France, un pays qu'il n'a pas choisi mais qui accepte les réfugiés. Il a mis sept mois depuis son départ d'Iran jusqu'à son arrivée en France. Il va passer d’abord deux jours à marcher en Iran pour arriver à la frontière de la Turquie. De là, il passe par la Grèce où il fera plusieurs jours en prison ralentissant son voyage. Il continue en Macédoine, en Serbie, en Croatie, en Slovénie et l’Italie. Tout cela à pied, en camion ou bien encore par bateau. Tout ces changements de pays ont été possibles grâce à des passeurs même si certains ont retardé le voyage comme celui de la Croatie, le voyage devait durer dix heures mais a finalement duré vingt jours. Il nous explique avec émotion les conditions précaires dans lesquelles il vivait : « un mois sans douche, des jours de marche en forêt, les feuilles d’arbres mangées avec de la sauce mayo pour survivre, l’argent et le portable perdu à Paris quand je dormais sous les ponts, Porte de la Chapelle ». A la fin de son périple de sept mois il aura perdu dix-neuf kilos, quatre dents et aura passé quarante-quatre jours en prison. Des trois, seul Mahdi bénéficie d'un titre de séjour.

Cette rencontre nous rappelle que derrière chaque migrant se trouvent des individus avec des histoires uniques qui méritent d'être écoutées et respectées.
Lopin Lilou, Le Gall Lise
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